Hier matin, je me suis rendu sur le site de tri des déchets de la SYCTOM à Romainville. C’est au bout d’une rue jonchée de détritus et de sacs poubelles, en contrebas d’une nationale, à quelques minutes de la porte de Pantin. 83 villes franciliennes, dont Paris, y convoient leurs déchets. C’est une délégation de service public, naguère gérée par Véolia, aujourd’hui par Urbaser, son cousin espagnol.
Des salariés sans-papiers occupent le site depuis plusieurs jours.
Certains ont travaillé cinq, sept ou dix ans en Intérim, au même poste. Parce qu’ils sont en intérim, on les vaccine pas contre le tétanos et ils n’ont jamais pu régulariser leur situation Après Naples, le film Gomorra, Paris n’échappe pas à « l’ordure connexion » - pour reprendre les mots Jean-Charles Schmidt de la CGT.
J’aime bien cette expression car elle dit exactement ce que c’est. Malhonnête, indigne, injuste – et juteux.
Sur le dos d’hommes sans droit qui perdent leur odorat à charrier nos déchets de riches, de grosses sociétés s’engraissent avec volupté au mépris de tous les règlements en vigueur. Une société d’intérim a même trouvé une nouvelle spécialité : les sans papiers. C’est tellement pratique pour ajuster la main d’œuvre à la production. C’est donc cela, la délégation de service public… Une aubaine.
Quand on sort du site de Romainville, de retour dans la petite rue encombrée de sacs poubelles, nous avons remarqué une femme malade qui vivait là. Les misères se côtoient. Les Roms font un second tri dans nos déchets, ils cherchent la ferraille, et ils dorment à l’abri d’un igloo d’ordures. Un médecin de Médecins du Monde passera ausculter cette femme dont le front était brûlant, et la toux, déchirante.
En rentrant, Catherine Vieu Charier qui siège au SYCTOM a envoyé une lettre à François Dagnaud qui le préside pour demander une assemblée extraordinaire des élus qui l’administrent. Et nous, nous faisons tout pour que ces hommes aient un contrat à durée indéterminée et qu’ils puissent régulariser leur situation.
A Paris, les rues sont propres. Il y a quelques semaines, malgré notre opposition, le Conseil de Paris a décidé de la privatisation de la collecte des ordures ménagères. Sur le même modèle que la délégation de Service Public à Romainville… Cela donne envie.