Grosse journée, aujourd'hui. Au menu du Conseil de Paris du mois de novembre : le logement. Plus précisément, le Programme Local de l'Habitat qui fixe la politique de la Ville de Paris en matière de logement pour les 5 années qui viennent. Ce n'est donc pas un sujet anodin, surtout quand on sait qu'il s'agit du principal problème auquel se heurte les Parisiens. Disons le franchement: dans sa version initiale, ce plan n'était pas à la hauteur des besoins. Nous avons dit d'emblée, qu'à nos yeux, deux éléments devaient être revus: d'abord la question du rythme de production des logements sociaux. Depuis 2001 et l'arrivée de la gauche à la Mairie, ce rythme n'a pas cessé de croitre. Au départ, nous produisions 3000 logements sociaux. Cette année, nous en produirons 6600. Dans sa version de départ, ce plan prévoyait de maintenir ce rythme jusqu'à 2014 pour passer ensuite à 4000 jusqu'en 2016. Un contresens, à l'heure où les prix du privé explosent. Nous l'avons dit, et nous avons obtenu gain de cause.
Pour les curieux, voici l'intervention que j'ai prononcée ce matin :
Monsieur le Maire, chers collègues,
Dans la bataille que nous menons depuis 2001 contre la spéculation immobilière et pour le droit au logement, ce PLH marque indéniablement une étape importante.
Presque dix ans ont passé, nous avons beaucoup agi, mais la situation demeure préoccupante. Paris est malade. Malade de son manque de logement, de ses familles progressivement chassées de son cœur, et d’un mouvement de renchérissement continu du mètre carré qui le rend inabordable. Nous avons parfois su ralentir la progression de cette maladie, mais nous sommes bien loin d’une rémission ou d’une guérison.
Vous le savez, pour le Groupe Communiste et élus du Parti de Gauche, le logement est un dossier prioritaire. Au-delà d’un engagement viscéral de chacun d’entre nous, c’est bien notre conception de la Ville qui est en jeu.
La mixité sociale est une chance pour Paris, pour sa vitalité, pour son identité. Notre ville s’est construite sur l’accueil de tous : des migrants, des défavorisés, des opprimés. Elle s’est construite sur le mélange : des origines, des métiers et des personnes. Nous sommes redevables de cette histoire, de ces familles qui ont trouvé ici un refuge. Paris leur a donné le droit d’exister, Paris leur a donné un toit, une occupation, les moyens de vivre. Ces hommes et ces femmes lui ont donné en retour bien plus encore, ils ont façonné la ville. Ils ont fait de nous ce que nous sommes.
Le Groupe Communiste et élus du Parti de Gauche revendique ce droit à la Ville. Sans logement abordable, il n’y a pas de droit à la Ville. Il n’y a plus qu’un devoir de partir sans demander son reste. Il n’y a plus qu’un darwinisme social consternant de cruauté et d’indifférence. Il n’y a plus qu’un désolant désert architectural sans vie – de ceux dont rêvent nos collègues de droite : muséifié, silencieux, privilégié. Une ville morte, une ville sans espoir. Une ville sans âme.
La reprise de la spéculation immobilière, après un tassement relatif dû à la crise, risque encore d’accélérer ces processus d’exclusion. Selon la chambre des Notaires, la hausse s’est intensifiée au mois d’août. Sur une année, avec 12,9% d’augmentation, Paris devance le reste de l’Île-de-France (10,8% en petite couronne, 7,4% ailleurs). Le mètre carré approche les 7000 euros en moyenne, désormais. L’indice des prix tous logements de la région vient de battre le record historique de septembre 2008.
Face à une situation aussi grave, force est de constater que la droite ne nous est d’aucune aide. Pire encore, elle fait tout, ici comme au niveau national, pour freiner la production de logements sociaux et laisser les mains libres aux spéculateurs. Ce débat en est encore l’illustration éclatante. Il suffit pour s’en convaincre de jeter un œil à la batterie d’amendements et de vœux déposés par les élus UMP. Les masques tombent, pour ceux qui croyaient encore aux pantomimes de l’UMP et du Nouveau Centre. Au Grand Prix de l’Hypocrisie, mon cœur balance entre ceux qui invoquent le respect du Patrimoine, l’harmonie du paysage, la sensibilité du voisinage, voire la mixité sociale. Quelle créativité, quelle ingéniosité, quelle inventivité lorsqu’il s’agit d’éviter que le logement social s’installe sur son territoire. Créativité de M. Goasguen qui nous propose d’amender un projet visant à installer 4 logements sociaux au 14, rue Daumier, dans le 16ème, pour que soient supprimés les logements sociaux et très sociaux et que s’y substituent des logements intermédiaires. Ingéniosité de Mme Dati qui nous démontre toute l’étendue de ses talents en déposant ce matin 5 amendements qui visent tous, sans exception, à éviter toute forme de mixité sociale sur son territoire. Elle nous propose, par exemple, que « les immeubles classés monuments historiques soient exclus du champ d’application de la règle de réalisation d’une quotité minimale de logements sociaux ». Elle nous propose également que « les logements sociaux du 7ème soient réservés aux demandeurs de logements sociaux habitant le 7ème ». Pensez y, on ne sait quel tremblement de terre risquerait d’advenir si un habitant du 18ème arrondissement posait un pied sur le sol du 7ème. Inventivité encore lorsque Monsieur Lamour, jamais à court d’une bonne idée, préconise que toute installation de logements sociaux soit précédée, je cite, d’un « diagnostic de sécurité ». Parce qu’à vos yeux, et vous avez déjà eu l’occasion de le dire, la mixité sociale est forcément synonyme de délinquance. Comment mieux dire, comment mieux signifier que ceux qui siègent à la droite de cet hémicycle sont en réalité les partisans d’un égoïsme social, les tenants d’un apartheid urbain ?
Face à une telle opposition, la responsabilité qui pèse sur nos épaules est considérable. Rien ne serait pire que de ralentir nos efforts. Parce que précisément, ce serait céder et donner raison à ceux qui ne veulent pas de mixité sociale à Paris.
Le document qui est soumis à notre vote rappelle nos engagements de mandature : produire 6000 logements sociaux de plus par an jusqu’en 2014, et continuer la lutte contre la gentrification et l’exclusion.
Cependant, ce PLH trace des perspectives pour l’avenir, jusqu’en 2016, à son échéance. La réduction de la création de logements sociaux, de 6000 à 4000 par an pour la période 2014-2016, inscrite noire sur blanc dans ce PLH, est pour notre groupe inacceptable. C’est un signe de modestie dans nos ambitions qui s’apparente à une forme de découragement et d’abandon. Les 20% de logements sociaux exigés par la loi SRU sont un seuil d’engagement minimal, certainement pas un aboutissement. Je l’ai dit, tout à l’heure, avec l’explosion des prix de l’immobilier, le malade connaît une poussée de fièvre sans précédent. Et passer de 6000 à 4000 logements sociaux par an reviendrait à passer d’un antibiotique au paracétamol. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement visant à maintenir à tout le moins un objectif de 6000 logements sociaux par an pour toute la durée couverte par ce PLH.
Dans un même mouvement, nous considérons qu’il faut agir avec détermination pour rééquilibrer le logement social sur le territoire parisien. Il est impensable que certains arrondissements assument tout l’effort de production de logements sociaux, pendant que d’autres s’y refusent et continuent de vivre dans leurs ghettos de riches. Il faut avoir le courage de casser ces ghettos de riches, d’acquérir des immeubles à l’ouest et au centre pour faire de la mixité sociale partout. C’est le sens du vœu que nous déposons et qui vise à ce que nous puissions préempter au centre et à l’ouest, dans des arrondissements où le prix au mètre carré dépasse largement la moyenne parisienne, ce que nous faisons trop peu aujourd’hui. Par ce vœu, il s’agit de faire que notre volonté de mixité sociale s’inscrive partout, et donc aussi au cœur des arrondissements du centre et de l’ouest parisien. Au cœur de quartiers protégés et uniformes, au cœur de ces forteresses de l’entre soi défendues par les chevaliers blancs de l’UMP. Au cœur de la discrimination par l’argent et de la spéculation immobilière. Il faut en finir avec le fatalisme des réserves et des enclaves, sortir un maximum d’immeubles du marché immobilier, briser le mur de l’argent qui coupe Paris en deux. Le rapport du Comité de Vigilance sur le Logement et la Solidarité nous incite fortement à réaliser cet effort de rééquilibrage. Toute modestie est un recul, car la situation est urgente, et nous avons pu constater depuis 2001 que le renchérissement délirant du mètre carré dans notre ville est un mal qui se propage vite, et partout.
Pour cette raison, Monsieur le Maire, le Groupe Communiste et élus du Parti de Gauche a déposé une série d’amendements et de vœux visant à améliorer ce PLH, à faire en sorte qu’il se hisse à la hauteur des attentes des Parisiennes et des Parisiens. Ces propositions s’inscrivent toutes dans la continuité d’un combat que nous menons ensemble depuis dix ans. Nous avons donc bon espoir qu’ils puissent être votés.
Je vous remercie.
Dans la colonne de gauche "les blogs", ils sont à supprimer car aucun ne fonctionne.
Concernant le logement social dans la capitale, c'est un incontestable progrés qui se met en place depuis la gauche bien aiguillonée par les propositions PCF. Cependant il faut s'évertuer à assurer la maintenance des réalisations et également engager la gestion démocratique des cités et là, le seul exemple où le PCF a la présidence de la société bailleur,c'est la catastrophe. Il ne peut y avoir de fierté à rester en sous-effectif mal qualifié de surcroit et à ignorer les plaintes des locataires qui peu à peu portent un jugement trés négatif sur le PCF et toute la gouvernance à gauche. Le groupe communiste doit sans délai, réagir et former ses cadres pour que la politique du logement ne soit pas laissée en pâture aux hobbies du BTP et des multinationales de services. Le sujet est suffisament grave pour que j'arrête ici; par contre je suis à ta disposition pour toutes infos et propositions complémentaires.
Rédigé par : Elie Vic | 21 novembre 2010 à 14:31