Lundi 19 octobre, le Conseil de Paris débattait des orientations budgétaires en vue du budget 2011. Voici mon intervention.
Monsieur le Maire, Chers collègues,
Le débat sur nos orientations budgétaires pour 2011 s’inscrit, comme vous l’avez dit, dans un contexte social et économique critique pour un grand nombre de Parisiennes et de Parisiens, un contexte tendu chaque jour un peu plus par les choix d’un gouvernement qui prend prétexte de « la crise » pour amplifier ses choix politiques aux effets toujours plus inégalitaires.
La crise, avec Nicolas Sarkozy, ne touche pas tout le monde, loin s’en faut ! Pour les amis du Fouquet’s, c’est le bouclier fiscal et les légions d’honneurs. Pour les salariés du privé, c’est « travailler vieux et gagner moins » et pour les fonctionnaires, c’est le gel du point d’indice pour perspective d’évolution salariale. Le triomphe de l’injustice sociale, c’est cela le véritable marqueur de l’ère Sarkozy. On le mesure à la lumière de certains chiffres dans l’actualité, comme la 3e place mondiale que la France vient de décrocher dans l’accueil du nombre de millionnaires. Dans le même temps, l’Observatoire des inégalités indique que la pauvreté en France a cessé de reculer, comme elle le faisait pourtant depuis les années 70, et touche aujourd’hui 8 millions de Français.
Mais le contexte, Monsieur le Maire, c'est aussi, c'est surtout celui d’une mobilisation sociale exceptionnelle, qui appelle des orientations politiques et économiques radicalement différentes, en rupture franche avec celles qui ont mené notre planète à la crise. Ce contexte nous invite à faire preuve d'une combativité à toute épreuve dans la mise en oeuvre de nos politiques. A l’occasion de ce débat d’orientation budgétaire, les élus de notre Groupe souhaitent inscrire deux priorités au budget primitif de 2011, dont nous débattrons en décembre prochain. Ces deux piliers de notre politique locale, vous en parlez dans votre communication, sont l’accès au logement – dont sont encore exclus 120 000 demandeurs de logement social à Paris – et la situation des personnels de notre collectivité, soit près de 50 000 personnes qui contribuent directement à la qualité et au développement des services rendus aux usagers parisiens.
Notre effort en faveur de l’accès au logement a déjà été considérable, avec le financement de 30 000 logements sociaux lors de la précédente mandature. Pourtant, à Paris, le coût de la vie et en particulier la part du logement dans le budget des foyers continue à exclure. Avec une hausse moyenne de 9 % depuis le début de l'année, acheter un logement à Paris devient impossible pour les ouvriers, les employés mais également pour les cadres, chassés de la capitale, où le prix du mètre carré avoisine 7 000 euros. Dans trois arrondissements, il a même dépassé les 9 000 euros. Avec cette spéculation immobilière qui s'emballe, c'est l'esprit même de Paris qui est en péril: sa diversité sociale, cette mixité qui font sa force et sa richesse.
Face à cette situation inquiétante, il faut plus que jamais maintenir l'objectif de 40 000 logements sociaux sur l’ensemble de la deuxième mandature. Nous atteindrons ainsi l'objectif fixé par la loi SRU dès 2014. Il s'agit d'ailleurs pour nous non pas d'un seuil maximum, mais d'un seuil plancher qui a vocation à être dépassé pour aller vers les 30% à horizon 2030, ainsi que le préconise le SDRIF. Mais il nous faut dans même temps accorder une attention décisive à la question de la répartition de ces logements sociaux dans le territoire parisien. A cet égard, il nous faut tenir compte de certains éléments d’analyse qui ont été portés à notre connaissance récemment.
En effet, le rapport de la Chambre régionale des comptes concernant la politique parisienne dans le logement social, soumis au Conseil de Paris le mois dernier, a mis en évidence un problème persistant de déséquilibre entre les arrondissements dans la répartition des logements sociaux. Notre groupe est intervenu à plusieurs reprises pour que les quartiers riches cessent de défendre bec et ongles un « entre soi » qui est une injure aux valeurs de notre Ville. Ce blocage, honteusement encouragé par des maires d’arrondissement de droite, n’est tout simplement plus tolérable au regard notamment des situations tragiques de mal-logements que nous connaissons tous à Paris, en particulier dans nos permanences d’élus.
Aussi pour répondre positivement aux besoins de logement des demandeurs de toutes catégories socio-économiques et pour lutter contre la gentrification de la population parisienne, notre production de logements sociaux doit se poursuivre et s’amplifier, notamment dans les arrondissements qui en comptent aujourd'hui très peu.
Disons le franchement : un tel objectif ne pourra pas être atteint qu'à condition de développer massivement notre politique d’acquisition foncière et immobilière dans le Centre et l’Ouest de Paris. Et chacun le sait : nous n'y arriverons pas si nous restons cramponnés au plafond qui nous empêche d'acheter au-delà de 6000 euros du mètre carré. Nous considérons pour notre part que l'objectif de rééquilibrage du logement social à Paris suppose que ce plafond soit levé. Faute de cela, nos discours sur la mixité sociale n'auront qu'un effet limité sur la réalité vécue par les Parisiens.
Nous sommes aujourd’hui en capacité financière de le faire. L’augmentation des transactions en nombre et en prix à Paris va augmenter considérablement nos revenus issus des droits de mutation. 700 M € de revenus de fiscalité immobilière ont été inscrits au budget supplémentaire en juillet. Et nous sommes déjà bien au-delà de cette prévision, que vous avez vous-même qualifiée de « prudente ». En toute cohérence, ces revenus variables, supplémentaires, issus du marché de l’immobilier, doivent nous permettre d’augmenter le parc de logements sociaux à Paris et de rééquilibrer son implantation. Nous devons abonder massivement notre compte foncier et veiller à ce qu’il soit intégralement utilisé pour amplifier notre offre de logements !
Rappelons le : notre taux d’endettement est particulièrement bas. Il s’établit à 39% de nos recettes contre 80% en moyenne dans les autres grandes villes. Notre autofinancement reste particulièrement élevé puisque les 2/3 de nos investissements sont financés sans recours à l’emprunt. Beaucoup de coupes budgétaires ont été exigées pour maintenir de bonnes conditions d’emprunt. Notre autorisation d’emprunt doit donc, contrairement aux années précédentes, être mobilisée en totalité et ce, d’autant plus que son montant reste très faible au regard du haut niveau d’investissement que nous maintiendrons en 2011.
Vous l’avez compris, Monsieur le Maire, nous pensons que les recettes exceptionnelles de la fiscalité immobilière mais aussi l’emprunt doivent nous permettre d’augmenter nos investissements en faveur du logement public, pour avancer vers plus de mixité sociale à Paris, dans tous les quartiers.
Nous souhaitons que notre combativité soit à l'identique lorsqu'il s'agit de se battre pied à pied pour défendre les 50 000 agents qui travaillent pour notre collectivité. Cette question aussi doit attirer toute notre attention dans l'élaboration du budget 2011. Ces dernières semaines ont été l'occasion pour certains de se lamenter sur le thème de l'augmentation de la masse salariale de notre Ville et de notre Département. Pour notre part, nous n'avons pas la religion de la baisse de la masse salariale, pas plus dans le public que dans le privé. Nous ne l'avons jamais eu. Nous ne l'aurons jamais. Parce que chaque jour permet de mesurer les effets désastreux de la politique de réduction drastique du nombre de fonctionnaires menée au niveau national. Nous ne sommes pas, à l'opposé de certains de nos collègues qui siègent à la droite de cet hémicycle, des adeptes d'une secte qui porterait le nom de RGPP et dont le gourou serait Christine Lagarde. Nous considérons pour notre part que les 50 000 agents qui travaillent au service de notre collectivité sont une chance pour notre ville, une chance pour les Parisiens.
Respecter les agents de la collectivité parisienne, cela suppose, dans un contexte de crise aiguë, de prêter une attention toute particulière à leur pouvoir d'achat. Le gouvernement a annoncé le gel du point d’indice, et veut entériner la casse de notre système de retraite par répartition, c'est-à-dire appauvrir un peu plus les foyers déjà fragilisés.
Un grand nombre des personnels de la collectivité va donc continuer de subir la dégradation de ses conditions de vie. La rareté de l’embauche, la montée de la pénibilité due au travail à flux tendu, l’augmentation des prix – dont les transports – et la baisse équivalente des revenus : tout cela doit nous inciter à avoir une autre ambition pour nos personnels.
La revalorisation du pouvoir d’achat des revenus les plus bas est plus que jamais nécessaire. Tout comme l’attention que nous devons porter aux conditions de travail des agents et aux moyens mis à leur disposition pour mener à bien les missions qui leur sont confiées.
Voilà, Monsieur le Maire, sur deux questions décisives, les priorités que notre Groupe défendra à l'occasion de ce budget 2011.
Je vous remercie.
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