Les bras m’en tombent. Au Conseil d’Arrondissement du 18e, lundi dernier, nous avons voté à l’unanimité un vœu proposant, à l’initiative du Conseil de Quartier La Chapelle – Marx Dormoy, de donner à la « Rue Neuve » le nom d’Albert Simonin. En cherchant sommairement (www.dixhuitinfo.com l'a fait), on découvre que cet écrivain, auteur de Touchez pas au Grisbi, scénariste des Tontons Flingueurs, père du Petit Simonin Illustré (un dictionnaire d’argot), aurait été un journaliste d’extrême droite, un collaborationniste fervent et un antisémite notoire. Il a d’ailleurs été condamné à cinq ans de prison à la Libération.
Comme d’autres élus du 18e arrondissement, je ne connaissais pas la part d’ombre de cet enfant de La Chapelle, déjà proposé à la dénomination du collège de la place Hébert en 2003. A l’inverse de sa carrière littéraire, bien mieux connue. Nous ne nous sommes pas méfiés de ce vœu issu d’un conseil de quartier, soutenu par plusieurs de nos collègues. Roxane Decorte, élue de l'opposition, l’a défendu avec chaleur en affirmant qu’elle l’avait connu. Nous n’avions aucune raison de soupçonner qu’une gaulliste était en train de faire l’apologie d’un collaborateur. Mentait-elle par omission en nous dissimulant le passé d’Albert Simonin ? Ou mentait-elle tout court en affirmant qu’elle le connaissait ?
Il ne s’agit pas de remettre en cause la littérature d’Albert Simonin. Il a probablement sa place dans les anthologies et les histoires littéraires. En revanche, s’il est avéré qu’il a bel et bien eu une jeunesse coupable de collaboration, il est impossible de donner son nom à une rue ou à bâtiment. En effet, la dénomination est un outil de mémoire collective. Ce n’est pas la récompense sélective de certains de ses mérites. Ni l’amnistie de ses fautes.
Je suis étonné, cependant. Et attristé. Personne ne s’est visiblement donné la peine de faire une recherche sur Albert Simonin. Et cela, depuis une première version du voeu... en 2004.
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