Souvent faire de la politique, c’est sourire, serrer des mains, embrasser les enfants – en un mot, se faire aimer. Quand il s’agit de convaincre, souvent, il faut aussi séduire. L’art de la négociation veut cela. Parfois pourtant, il faut aussi mettre les pieds dans le plat, au risque de se faire détester par ses adversaires. Persuader et contredire.
Comme j’ai bon caractère, je préfère éviter les conflits inutiles. Un peu Bisounours, si l’on veut. Mais parfois, il faut bien montrer les dents ! Comme au Conseil d’Administration de la Halle Saint-Pierre… Récit.
En bas du Sacré-Cœur, la Halle Saint-Pierre : un bel espace pas si bien entretenu que cela. Le carrosse en route vers la citrouille. Mais le plus inquiétant est ailleurs, quand on considère le passage d’une vingtaine de salariés dans les années 90 à une dizaine, aujourd’hui – et les très nombreux procès aux prud’hommes. Autant dire qu’hier soir, au moment d’entrer, j’étais sur mes gardes.
La directrice en place depuis 1995, Madame Lusardy, me salue froidement. Quelques minutes plus tard, ma première intervention lui donne raison. Je fais remarquer en effet qu’au dernier Conseil d’Administration, tous les Conseillers de Paris ont été notés absents : nous n’étions pourtant pas encore nommés… Etrange, non ? Le regard de Madame Lusardy en dit long : je suis un casse-pieds.
A l’ordre du jour : la subvention de la ville de Paris. Pour rappel, la municipalité verse 680 000 euros à la Halle Saint-Pierre, subvention stable comparée à celle de l’année dernière. Mais Madame Lusardy trouve que c’est « trop faible ». Elle pense qu’elle ne va pas pouvoir s’en sortir. Gentiment, j’essaie de la raisonner : en période de crise, les subventions sont à la baisse, certaines sont supprimées – celle-ci est maintenue. Elle me coupe la parole : « vous ne connaissez pas la Halle Saint-Pierre ». Je lui conseille de changer de ton – le mien est sec, mais poli.
Un peu plus tard, nous abordons la suppression du service animation. Deux personnes, chargées des échanges avec les écoles de l’arrondissement, sont licenciées – dont la responsable syndicale. Je le déplore. Avec l’adjointe au maire du 18e chargée de la culture, j’explique que ce service est quand même la principale raison de la subvention de la Mairie de Paris. La directrice intervient : ce qui compte, ce sont les expositions. Ambiance.
Quelques minutes se passent, nous en arrivons à discuter de la masse salariale. Je voudrais le détail des différentes rémunérations. Madame Lusardy me coupe au beau milieu d’une phrase. Je lui fais remarquer que je n’ai jamais vu un Conseil d’Administration pareil. Elle menace de s’en aller. Je pense : chiche. Mais je suis bien élevé, je n’insiste pas.
Je demande seulement la date de notre prochaine réunion : une fois en un peu plus d’un an, je trouve que c’est peu, en effet. La directrice se récrie et m’annonce : « septembre ! ». Je lui rétorque : « j’en suis ravi. Vous allez pouvoir vous habituer à moi ». Autour de la table, on rit. Madame Lusardy observe un silence glacé : je crois qu’elle me déteste. Sur le moment, je m’en veux un peu… En y repensant, pas du tout… Vivement le prochain Conseil d’Administration de la Halle Saint-Pierre !
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