Personne ne l’ignore, la Star Academy déménage rue Charlot dans le troisième arrondissement. A première vue, cette péripétie ne m’intéresse pas. Mais les réactions de certains me surprennent. Il vient de se créer sur Facebook un groupe intitulé « ceux qui ne veulent pas de la Star Ac rue Charlot ». Pourquoi pas, me dira-t-on. Par curiosité, je regarde et je lis que son but est d’agir pour que « l'émission la plus plouc du Paf ne s'installe pas dans la rue la plus cool de Paris ». Je suis perplexe. En fait, ce déménagement de la Star Academy n’est pas si anodin.
L’idée de la ville est constamment tiraillée entre une conception ouverte et une conception fermée. La semaine dernière, j’évoquai à ce propos la construction d’un mur séparant la cité de la Fouilleuse du reste de la ville de Rueil-Malmaison. Rue Charlot, c’est d’un mur mental qu’il s’agit.
De quel droit interdirait-on aux plus « ploucs » de fréquenter la rue « la plus cool » ? Pourquoi ne pas engager un physionomiste à la sortie de la station Saint-Paul pendant qu’on y est ? Ce serait plus simple. Tant qu’à faire, une guest-list ou un dress-code nous simplifierait l’affaire. Cachez ces adolescentes maquillées comme des camions volés, habillées bon marché et criant de manière hystérique le nom de leur chanteur préféré ! Je ne saurais les voir dans le troisième arrondissement. Non, définitivement, ce n’est pas de cette ville-là que je rêve…
Une certaine méfiance s’est installée dans la ville – qu’il nous importe de combattre par tous les moyens. De manière générale, de plus en plus de voix s’élèvent pour protester contre la vie trop vivante, comme si elle nous menaçait, comme si elle nous faisait peur. Ici, ce sont des pétitions contre des logements sociaux, là, des plaintes contre un établissement de nuit dont la clientèle fumeuse a envahi un bout de trottoir. Depuis plusieurs mois, on observe que des établissements se voient privés de leur autorisation de nuit sans raison – et le promeneur nocturne traverse des déserts architecturaux pour rentrer chez lui. On voudrait réglementer la circulation des personnes – enfin surtout de certaines. Il y des lois contre les nuisances, la Star Academy n’y dérogera pas, pourtant.
Au droit d’être bien chez soi, de bien dormir et d’aimer son quartier, on superpose l’ostracisme, l’intolérance et le délit de sale gueule. La pente est horriblement savonneuse. Le ghetto, ce n’est pas la vie. La vie est entière, elle est riche, contradictoire, mélangée, c’est un tout : on n’en sépare pas ce qu’on croit le bon grain de l’ivraie. On m’objectera que je ne regarde pas la Star Academy (je préfère une émission concurrente)… Je suis sûr que parmi ceux qui signent des pétitions contre son déménagement, il y en a plus d’un qui la regarde.
Assez d'accord avec toi, Ian.
Cela dit, non seulement le phénomène de rejet du type "je ne veux pas de ça dans mon quartier" a toujours existé, mais en plus nous y cédons tous un jour ou l'autre : pour prendre un exemple récent, rappelons nous que le Parti a été le premier à protester contre l'installation du siège du FN à Nanterre.
La cause peut être plus ou moins noble (c'est sûr que "pas de fachos dans nos quartiers" ça sonne mieux que "pas de ploucs rue Charlot"), nous cédons tous un jour ou l'autre à ce rejet.
Je ne défends pas pour autant la provocation du FN (je suis le premier à trouver choquant et inadmissible que ces gens-là s'installent sur les pentes du Mont Valérien), je m'interroge simplement : est-ce qu'on peut vraiment reprocher aux autres ce que nous-même nous faisons ?
Rédigé par : Miki | 08 septembre 2008 à 14:40
On rêve. On hallucine.
Ian Brossat, président du groupe communiste au chevet de l'émission la plus anti-culture du paf.
Faut il rappeler que cette émission est l'outil d'auto-promotion du grand vendeur de lessive en chef, j'ai nommé Pascal Nègre, patron d'Universal Music Inc. ?
Faut il rappeler combien les méthodes développées dans cette émission, et par ledit Pascalou mettent en danger la production culturelle de ce pays, voire de la planète quand on regarde la taille et l'importance de la boite ?
Faut il rappeler que ce nivellement culturel, ce formatage, que l'on voit s'opérer dans cette émission, qui est la définition ontologique est une des causes de la mort culturelle du pays, bien plus efficace que des milliers d'ados sur p2p ????
Et un membre du parti d'Aragon et de Ferrat défend, caché derrière son petit doigt, cet outil de la propagande commerciale !!!
Avec quels arguments encore ! Comme si c'était par ostracisme racial que l'on rejettait l'émission de Pascal "joli costard brillant" Nègre. Là encore, l'erreur est manifeste.
Je vous le disais, on rêve.
Rédigé par : jb robert | 08 septembre 2008 à 17:42
Bonjour JB,
Je suis très heureux de vous avoir fait rêver. J'ignorais que j'avais ce talent... Plus sérieusement, il ne s'agit en aucun cas de défendre tel ou tel programme, mais de s'interroger sur les réactions suscitées par le déménagement de cette émission, et plus largement sur le type de ville que nous voulons promouvoir. Il me semble que vous confondez le prétexte de cet article et son sujet. Ravi de vous avoir fait réagir, j'espère que je continuerai à visiter vos rêves...
Rédigé par : Ian | 08 septembre 2008 à 17:54
Justement. C'est bien de celà dont on parle. La pluralité, qu'elle soit culturelle, urbaine, politique, mediatique est toujours bonne à prendre et à défendre. Et c'est bien de celà dont il s'agit en l'occurence. Et c'est bien cela qui est attaqué par la StarAc :
du point de vue culturel, s'installer rue Charlot, c'est commme installer un concert de Vive la Fête au club de retraité de neuilly.
du point de vue urbain, faire de ce quartier un nouvel eldorado, lui encore populaire -même si la encore il y aurait à dire - est une vraie insulte. Oui, la rue Charlot est une rue cool, et la starAccisation de cette rue n'est pas une bonne chose, car cela ne fera qu'accélérer la gentrification du quartier.
Rédigé par : jb robert | 08 septembre 2008 à 18:25