Hier, je répondais aux questions des internautes sur yagg.com. En voici l'intégralité...
modérateur: Bonjour. Le chat va commencer dans quelques minutes… Nous sommes ravi-e-s d’accueillir Ian Brossat, président du groupe communiste au Conseil de Paris.
Ian Brossat: Bonjour, Je suis ravi de participer à ce chat d’autant que je suis un visiteur régulier de Yagg.
Gabs: Pouvez-vous nous éclairer sur la position officielle du Parti communiste en matière d’égalité des droits des homosexuels en France et plus particulièrement en ce qui concerne l’homoparentalité. En effet je travaille dans une collectivité territoriale dirigée par une équipe communiste et en tant que futur parent social, je n’ai pas obtenu à ce jour l’accès aux 11 jours du congé « paternité ».
Ian Brossat: Le Parti communiste est favorable au mariage pour tous les couples. C’est une position qui a été rappelée par Marie-George Buffet dans une proposition de loi qu’elle a déposée à l’Assemblée nationale et nous sommes évidemment favorables à l’adoption pour tous les couples et donc pour les couples homos notamment. Et ces deux propositions figureront dans le programme du Front de Gauche aux élections présidentielles et législatives l’année prochaine.
andywar: L’actualité, c’est un peu les scores ahurissants du FN. Quel regard portez-vous là-dessus?
Ian Brossat: Je pense que c’est évidemment très inquiétant, je suis élu d’un arrondissement populaire, le XVIIIe, et je constate moi aussi une montée préoccupante du racisme. C’est la conséquence, de mon point de vue, des manœuvres de Sarkozy qui a promu ces thèmes-là au cœur du débat politique. Mais au-delà, ça nous interpelle à gauche et ça révèle notre difficulté à créer un espoir. C’est justement le défi auquel nous sommes confrontés et c’est le seul moyen de faire reculer le Front national.
Pierrotdelalune: Une question qui s’adresse plus au conseiller municipal: Si un couple de personnes de même sexe se présente afin de se marier, feriez-vous pression pour que le (voire les) maire(s) de Paris fasse ce qu’a fait M. Mamère il y a quelques années, à savoir célébrer officiellement un mariage entre personnes de même sexe et ainsi remettre le débat de l’égalité des droits sur le devant de la scène. En tant que personne LGBT, je me sens comme un sous-citoyen n’ayant le droit que de payer des impôts mais n’ayant pas droit à célébrer mon amour comme tout le monde. Merci d’avance pour votre réponse.
Ian Brossat: Je pense que l’initiative de Noël Mamère était bienvenue et a permis avec quelques années d’avance de mettre les pieds dans le plat et de placer le sujet de l’égalité des droits sur le devant de la scène. Aujourd’hui, on est d’autant plus frappé de la discrimination qu’on connait en France que d’autres pays européens célèbrent des mariages gays, ce que nous, nous nous refusons à faire. Je serai ravi de célébrer votre mariage si j’en ai l’occasion.
keals: Faut-il (la population gay) vraiment avoir peur de Marine Le Pen?
Ian Brossat: Je pense que oui. D’abord parce que le Front national a toujours eu des positions rétrogrades sur les questions de société. Tout récemment, Marine Le Pen a réaffirmé son opposition au mariage et à l’adoption pour les couples homos. Et quelles que soient les tentatives de se donner une image moderne, son parti continue de rassembler tout ce que la France peut compter d’intégristes et de réactionnaires. Il y a un enjeu fondamental pour nous à faire reculer l’extrême droite.
andywar: La question LGBT fait-elle l’objet d’un travail particulier dans les instances du PCF ?
Ian Brossat: Oui. Les questions LGBT sont traitées au PC, le moins qu’on puisse dire c’est que ça n’a pas toujours été le cas. Mais sous l’impulsion de Marie-George Buffet, une commission travaille sur cette question dans nos instances, au sein de la direction du Parti communiste. De toute façon, le combat que nous menons pour l’émancipation des individus ne peut pas se concevoir sans un combat pour l’égalité des droits. C’est aussi ce qui fonde mon engagement au Parti communiste.
maya_l’abeille: Récemment une affaire d’agression homophobe a été résolue grâce à des caméras de surveillance, il faut peut-être être plus nuancé non? Des associations et lieux homos sont parfois pour.
Ian Brossat: Je ne suis pas favorable à la vidéo-surveillance. D’ailleurs lorsqu’il a été question d’installer une caméra de vidéo-surveillance en face du Centre LGBT de Paris, j’avais obtenu du préfet qu’il renonce à ce projet. L’essentiel pour faire reculer l’insécurité en général et les agressions en particulier c’est la présence humaine sur le terrain. Or jamais un gouvernement n’a supprimé autant de postes de fonctionnaires de police que celui-ci. Par ailleurs, pour faire reculer l’homophobie et les actes homophobes dans la société, il faut éduquer à l’égalité dès le plus jeune âge et le fait que la législation maintienne aujourd’hui la discrimination entre les couples homos et les couples hétéros ne nous facilite pas la tâche.
Raph: Le PCF s’interroge-t-il et se positionne-t-il sur les questions relatives aux personnes trans’ (psychiatrisation, stérilisations, non reconnaissance de la transphobie, etc…)?
Ian Brossat: Oui. Camille Barré est une des animatrices du collectif LGBT du Parti communiste. Elle est l’une de celles qui portent la voix des trans’ dans notre pays et elle était candidate aux élections cantonales dimanche dernier à Rueil Malmaison. J’ai participé avec elle à la dernière marche Existrans en octobre dernier. Nous sommes favorables à ce que la législation soit modifiée pour permettre à chacun de déterminer ses choix de vie et son genre.
Chris: Bonjour. Je voulais savoir si vous parlez de votre orientation sexuelle publiquement? Merci.
Ian Brossat: Puisque vous me posez la question, vous me donnez l’occasion d’en parler. Je vis avec un garçon depuis dix ans, que j’ai rencontré à Lyon. Nous sommes pacsés et la vie est belle.
gwenael: Quel regard portez-vous sur l’action de Bertrand Delanoë vis-à-vis des lesbiennes, des gays, des bis et des trans’?
Ian Brossat: Incontestablement, Bertrand Delanoë, par son coming-out, a considérablement contribué à changer la vie des homos en France et le regard qu’ils portent sur eux-mêmes. Parce qu’il a été le premier homme politique français d’envergure à le faire, parce qu’il l’a fait de manière extrêmement digne. Je me souviens qu’à l’époque, son coming-out m’avait beaucoup marqué. Pour le reste depuis 2001, l’action de la ville de Paris en direction des personnes LGBT a changé du tout au tout par rapport à la gestion précédente de la droite: les associations LGBT n’étaient pas reçues, elles n’étaient pas subventionnées. Aujourd’hui, notamment sous l’impulsion du groupe que je préside, tout cela a changé. Il y a encore beaucoup à faire mais honnêtement, il n’y a pas photo par rapport à ce qu’on a connu avant.
canardcache: Pourquoi voter PCF alors que le PS est plus puissant et a davantage de chances de gagner? Quelles sont vos différences fondamentales… mais pas que sur les questions LGBT?
Ian Brossat: Je pense qu’il faut voter pour le Front de gauche parce qu’avec le Parti socialiste, on s’arrête au milieu du chemin. Dans la période actuelle, on a besoin de réponses claires. Malheureusement, j’ai trop souvent le sentiment que le Parti socialiste cherche à ménager la chèvre et le chou. C’est le cas sur les questions économiques et sociales, mais c’est le cas aussi sur les questions LGBT où à mon sens nous avons été trop timides entre 1997 et 2002. Du côté du Front de gauche, les choses sont claires, nous disons que dès les premiers mois après la victoire de la gauche en 2012, il faudra changer la législation et garantir l’égalité des droits pour tous les couples.
Maya_l’abeille: Des liens demeurent entre PC et CGT, ne pensez-vous pas que ce grand syndicat devrait faire plus jusque dans les sections locales, entreprises comme services publics, contre l’homophobie?
Ian Brossat: Le Parti communiste et la CGT ont une existence autonome et il faudrait surtout poser la question à un responsable de la CGT. Je partage complètement l’idée que les discriminations sur les lieux de travail sont une question très importante. Mais je sais que la CGT prête une attention toute particulière à cette question dans toutes ses instances, notamment nationales. Et qu’un groupe de travail spécifique existe à la CGT sur ces enjeux.
steph75: A priori rien à voir avec les LGBT, mais pour 2012 vous êtes plutôt Mélenchon ou plutôt Pierre Laurent?
Ian Brossat: Dans la mesure où mon ami Pierre Laurent n’est pas candidat, la réponse est dans la question.
Maya: Que faire au sujet de la baisse brutale des subventions sida de l’État? Et de la fermeture de services hospitaliers et de crédits recherche en berne?
Ian Brossat: J’ai été alerté par le Sneg tout récemment sur la baisse de la subvention DGS. Cette situation est ahurissante dans le contexte qu’on connait. Par ailleurs, en Ile-de-France, l’Assistance publique est confrontée à une casse terrible. Ce qui est susceptible de changer la donne, c’est la mobilisation des associations, des personnels de l’hôpital public et des élus. En tout état de cause, on ne peut pas laisser passer une telle décision sans réagir.
steph75: Le Parti communiste n’a pas une image très moderne et il a beaucoup été affaibli ces dernières années… Qu’est ce qui vous a poussé à vous engager au sein de ce parti-là?
Ian Brossat: Les dernières élections cantonales montrent que le Parti communiste ne se porte pas si mal. Il souffre, c’est vrai, d’une image qui ne correspond pas à la réalité. Au Conseil de Paris, nous sommes le groupe qui a la moyenne d’âge la plus basse. Pour ce qui me concerne, j’ai adhéré au Parti communiste à l’âge de 17 ans, il y a donc 13 ans. Parce que j’étais révolté par l’état de la société et que j’ai eu envie d’être utile.
gwenael: Quelles sont vos relations avec Bertrand Delanoë? Dans quels domaines avez-vous des points de désaccord?
Ian Brossat: Je m’entends bien avec le maire de Paris, ce qui ne m’empêche pas d’avoir des points de désaccord et de les exprimer. Lorsqu’il a été question de privatiser le service public de la propreté à Paris, je m’y suis opposé de même que sur la mise en place de la vidéo surveillance. Il reste que je suis fier d’appartenir à la majorité municipale qui contribue depuis 2001 à améliorer la vie quotidienne des Parisiens.
karim: Avez-vous une idée du montant des subventions attribuées aux associations LGBT chaque année? Et faut-il souvent se battre pour elles (avec la droite et/ou le reste de la gauche)?
Ian Brossat: Je n’ai pas en tête la somme totale des subventions aux associations LGBT. Ce que je peux vous dire, c’est que les associations LGBT n’étaient pas financées avant l’arrivée de la gauche et qu’aujourd’hui la droite ne vote jamais ces subventions. Par ailleurs, je me bats régulièrement pour que de nouvelles associations soient subventionnées. Le 28 mars, à la demande de mon groupe, une subvention de 30.000 euros sera votée au Paris Foot Gay pour soutenir son action contre l’homophobie dans le football.
alex: Votre engagement politique va-t-il se « limiter » à Paris ou souhaitez-vous à terme vous engager à un niveau national? Comme député par exemple.
Ian Brossat: Je n’ai jamais vécu la politique comme une carrière. D’ailleurs, j’ai un métier, je suis enseignant, même si j’ai dû me mettre en disponibilité depuis les dernières élections pour assurer mon mandat convenablement. J’ai bien l’intention de redevenir prof quand je le pourrai.
anonyme: Quand la Mairie de Paris va-t-elle donner le nom d’une rue ou d’une place du nom des deux derniers homosexuels brûlés sur un bûcher à Paris au XVIIIème siècle ?
Ian Brossat: C’est une excellente idée qui ne nous avait pas été soumise jusqu’à présent. Je solliciterai à ce sujet mon amie Catherine Vieu-Charier, adjointe au maire de Paris chargée de la Mémoire, et j’ai bon espoir que nous puissions le faire avant la fin de la mandature en 2014.
Maya: Trouvez-vous Paris au niveau des autres capitales en termes d’offre culturelle? Quelle est l’autre ville du monde qui vous fait « kiffer »?
Ian Brossat: À vrai dire, quand je ne suis pas à Paris, je pars à la plage et je profite plutôt de la mer.
moderateur: Le chat est maintenant terminé… Le mot de la fin à notre invité.
Ian Brossat: Je sors de ce chat avec quelques bonnes idées que j’ai bien l’intention de soumettre lors des prochains conseils de Paris et j’espère que j’aurai l’occasion de dialoguer à nouveau avec vous. A très bientôt!
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