Plusieurs articles ont paru ces derniers jours dans la presse, mettant en cause des membres du gouvernement, ainsi que d’autres élus de la majorité. Accusés de conflits d’intérêts, de favoritisme, de cupidité voir d’abus de biens sociaux, ils se défendent souvent mal et dégradent l’image des hommes et des femmes politiques. Très franchement, la peinture était déjà sévère, nous n’avions pas besoin que Fadela Amara, Jeanette Bougrab, Christine Boutin, Christian Blanc, Christian Estrosi ou les époux Woerth en rajoutent. Cela sent fort le parfum de scandale douteux des années 30 ou de la Belle Epoque. C’est d’autant plus regrettable que le débat n’est pas celui que l’on croit – et que de nombreux élus (une grande majorité) sont très scrupuleusement honnêtes.
Ce qui m’effraie bien plus que ces comportements médiocres relevés par les journalistes, c’est la faillite d’une représentation de l’ensemble de la population française. Le statut et la situation de l’élu rendent en effet très difficile la « carrière politique » (et cette expression pose problème) à ceux qui n’ont pas de fortune, qui ne sont pas employés par la fonction publique ou qui ne bénéficient pas de réseaux. En tant que professeur, je sais à la fois ma chance d’avoir choisi ce métier (auquel je pourrai retourner) en même temps que les pannes à répétition de l’ascenseur social. En contradiction avec un mouvement initié dans les années 20, puis renforcé à la Libération, les origines sociales (et parfois familiales) des élus se sont aujourd’hui considérablement resserrées – jusqu’à la caricature.
Quelques écoles, quelques professions, voire quelques quartiers fournissent aujourd’hui l’essentiel des élites politiques françaises. Le poids de l’Ecole Nationale d’Administration est l’arbre qui cache la forêt. Plus symptomatiquement, il faudrait parler du poids de Science-Po, de certaines écoles de commerce ou de certains grands lycées (surtout parisiens). Il faudrait se demander pourquoi (mais on devine malheureusement la réponse) les avocats, les médecins ou les chefs d’entreprises sont à ce point mieux représentés que les ouvriers ou les employés. Le scandale est dans la coterie plus ou moins malgré elle, dans le vivier qui ressemble de plus en plus à une petite flaque d’un quartier bourgeois de Paris.
En vérité, je crois profondément que les errances de certains élus et ministres qui se payent aujourd’hui sur le denier ou le bien public, sans négliger la gravité de ces actes méprisables, provient en grande partie de cette aristocratie reconstituée, ou de la « notabilisation » de la République Française pour employer un terme d’historien ou de juriste. Les privilèges se reconstituent, et avec eux, leurs dérives et leurs abus. Plus grave, les citoyens se sentent coupés de leurs élus dans lesquels ils ne se reconnaissent pas – et pour cause. Si le bien public est une vocation, la politique n’est pas une « carrière » comme les autres.
Le cumul des mandats, les effets de cours, les facilités du pouvoir et de l’argent public sont des dangers contre lesquels il faut lutter. Comme la plupart des élus communistes, je reverse la part de mon indemnité qui excède mon revenu d’origine. Pour moi comme pour beaucoup d’élus, le mandat est une charge et un devoir – qui n’est ni une opportunité de carrière, ni l’occasion de m’enrichir. On doit s’y consacrer par esprit de responsabilité. Encore faudrait-il que tous en aient les moyens. Cela réclame aujourd’hui non seulement un peu plus de dignité de la part de certains, mais surtout de la transparence – et l’aménagement d’un véritable statut pour les élus.
knowing something of everything and everything of something.
Rédigé par : coach outlet | 15 novembre 2010 à 09:48